Un gérant peut-il décider, seul, de changer d’expert-comptable ?

Les relations qu’entretient une entreprise avec son cabinet comptable sont essentielles. Elles sont basées sur la confiance, l’historique de l’entreprise et la confidence. Dans ce contexte, vous ressentez ce changement comme un acte qui aurait dû faire l’objet d’une information voire d’un accord préalable des associés.

 

 

Un Expert-comptable est un professionnel du chiffre mais aussi du droit. Il doit respecter des règles et des normes fixées par la Loi et par son Ordre (l’Ordre des Experts-comptables). Partant de ce principe, il semble intéressant de traiter la question de la liberté de choix du professionnel des deux côtés. Ainsi, il me semble judicieux de répondre aux deux questions suivantes :

 

L’associé peut-il choisir, seul, son expert-comptable ?

Du point de vue purement légal, un gérant peut tout à fait choisir, seul, l’expert-comptable qui va traiter la comptabilité de sa société.

Si j’évoque un point de vue purement légal, c’est qu’il faut comprendre que rien, dans la loi, ne peut obliger le gérant à consulter les associés s’il souhaite changer de cabinet comptable. En effet, contrairement à la nomination d’un commissaire aux comptes (qui doit être décidé lors d’une Assemblée Générale Ordinaire), la Loi n’oblige pas la tenue d’une telle assemblée pour le changement d’expert-comptable.

Par contre, les statuts de votre société peuvent, tout à fait limiter cette liberté en obligeant le gérant à demander l’accord des associés.

Vous avez donc tout intérêt à consulter, en détail, les statuts de votre société. Cependant, même si une telle clause y figure, l’expert-comptable serait-il lié ?

À travers cette question, se pose celle des pouvoirs du gérant par rapport aux tiers.

La loi attribue les pouvoirs les plus étendus au gérant vis-à-vis des banques, des clients, du personnel, des prestataires…

Cela signifie que si les statuts ou un Procès Verbal d’Assemblée venaient à limiter ou à conditionner les actes du gérant, ces clauses seraient inopposables au tiers.

Vous comprenez bien qu’il serait très inconfortable, voire impossible, de vérifier tous les PV et les statuts avant qu’une entreprise signe un quelconque accord juridique avec une société.

Par contre, cette position juridique de base doit se faire en fonction du contexte. Ainsi, s’il était démontré qu’un tiers avait connaissance du dépassement des limites des prérogatives du gérant, il serait responsable avec ce gérant d’un abus de droit. Autrement dit, la transaction entre ce tiers et la société serait annulable.

Pour un expert-comptable, toute la difficulté serait de déterminer si, en présence d’une clause statutaire obligeant le vote d’une assemblée pour changer de comptable, l’expert-comptable aurait dû vérifier les statuts avant la signature d’une lettre de mission…

 

Un gérant doit-il informer les associés de ce changement ?

Là encore, il va falloir se référer aux deux niveaux de droit applicables à une société et à ses associés :

 

La loi oblige-t-elle le gérant à informer les associés du changement du comptable ?

Du côté de la Loi, là encore, il n’y a aucune obligation d’information.

Le gérant n’a donc aucune obligation d’information antérieure ou postérieure au changement de cabinet.

 

Les statuts peuvent-ils prévoir une formalité d’information en cas de changement de cabinet ?

 

Une telle clause d’information peut, tout à fait, figurer à l’intérieur des statuts.

C’est souvent dans ces situations que l’on perçoit toute l’importance que représente la rédaction des statuts.

La loi laisse beaucoup de liberté dans les clauses que l’on peut insérer. C’est pour cette raison que les associés devraient prendre plus de temps pour réfléchir et analyser les conséquences des clauses à faire figurer au lieu d’utiliser les statuts types.

En résumé, votre gérant n’a donc contrevenu à aucune règle légale en n’informant pas les associés de ce changement de cabinet. Il ne vous reste qu’à parcourir vos statuts pour déterminer si une clause statutaire n’aurait pas été respectée.